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Diversité et performance en entreprise : décryptage

10 avril 2024 Evénements

« Women Leadership : Comment la diversité influe-t-elle sur le fonctionnement et les performances de l’entreprise ? ». C’était le vaste sujet, riche en contenu et propice au débat, de la table ronde qui a eu lieu à Lille le 26 mars dernier, organisée par SKEMA Alumni en lien avec la Direction Corporate et la Faculté.

Merci à Amélie Debrabandère (SKEMA 1992), Directrice Générale de SIA Habitat, Claire Gouat-Brunin (SKEMA 1995), Directrice Expérience Clients et Collaborateurs de Société Générale et à Fanny Vandenbussche, Directrice TALHENCY RH pour leurs partages d’expériences engagés, ouverts et enthousiastes ! Merci à Sophie Botte, Directrice Mastères Spécialisés SKEMA, pour l’animation de cette table ronde, mais aussi à Stéphanie Chasserio, Professeure de Management et Directrice Académie Globalisation, pour son keynote riche et instructif, s’appuyant sur ses recherches et celles de Michel Ferrary dans le dernier Observatoire de la féminisation des entreprises.

 

Cette table ronde a donné lieu à de réelles réflexions sur l’évolution des mentalités, les stéréotypes, l’inclusion et la diversité ou encore l’importance des rôles-modèles féminins comme masculins.

 

Etat des lieux

 

Depuis la loi Copé-Zimmermann de 2011, nous pouvons féliciter la France d’être championne du monde quant au nombre de femmes représentées dans les conseils d’administration. Pourtant, une marge d’amélioration sur bien des aspects existe et il est encore tôt pour crier victoire en matière d’égalité hommes-femmes. Au sein des entreprises du CAC 40, nous ne comptons aucune femme PDG, seulement deux présidentes, et trois directrices générales pour l’année passée. Du côté des comités exécutifs, les quotas sont plutôt remplis.
La loi Rixain encourage par ailleurs ce dernier indicateur, avec un objectif de 40 % de femmes dans les comités exécutifs d’ici 2030. Pour autant, il peut être intéressant d’analyser cela sous le prisme de l’évolution en entreprise. En effet, ces objectifs n’ont de valeur que si les directions des entreprises accordent de l’importance à l’évolution des femmes au sein même de leurs structures. Cela permet de comprendre, notamment à travers les études menées par Michel Ferrary, professeur à SKEMA Business School, où sont les « plafonds de verre » dans les entreprises. Nous pouvons également identifier grâce à ces travaux quelles entreprises parmi les plus puissantes sur le marché comptent un nombre conséquent de femmes cadres qui ne parviennent jamais à toucher du doigt les comités exécutifs dans leur carrière, par opposition à leurs homologues masculins.

Et les hommes justement dans tout ça ? Une inclusion semble nécessaire pour pallier un discours teinté de conservatisme et de masculinisme qui témoigne d’un sentiment de menace de leur statut. La tournure des discours semble également primordiale pour ouvrir les réflexions, se concentrer sur les réels besoins des femmes et les véritables enjeux de diversité au sein de l’entreprise. Les stéréotypes de genre ont encore la peau dure, et dans certains pays voisins, le sujet semble avoir un train de retard encore plus conséquent par rapport à la France.

Pour aller plus loin,  Stéphanie Chasserio, Professeure de Management et Directrice Académie Globalisation, nous invite à poursuivre la réflexion à travers l’ouvrage Blacklash de Susan Faludi.

 

Vaincre le syndrome de l’imposteur

 

Pour poursuivre les échanges avec nos intervenantes, Claire Gouat-Brunin introduit le cas concret de son secteur d’activité et de sa structure, Société Générale, en pointant du doigt des discours toujours réducteurs, des chiffres encore bas en matière d’inclusion, mais note une volonté d’amélioration et la mise en place d’actions concrètes pour contrer cela. Pour améliorer les indicateurs, les femmes doivent vaincre ce syndrome de l’imposteur indu par notre société, et s’affirmer à travers leurs réelles compétences et expertises.

SIA Habitat affiche un résultat remarquable au niveau de l’index égalité hommes-femmes, mais Amélie Debrabandère souligne que cela n’est en rien une victoire en la matière et reflète simplement l’état de la politique salariale de l’entreprise. Cela reste un exemple encourageant pour bien d’autres entreprises qui ont une belle marge de progression sur le sujet.

Amélie nous rappelle que l’équilibre vie professionnelle/vie personnelle est un facteur étroitement lié à l’inclusion, que les hommes sont plutôt frileux à l’idée de bénéficier du congé paternité ou encore que les femmes ne sont pas toujours les premières à se manifester pour saisir une opportunité d’évolution de poste.

Fanny Vandenbussche, quant à elle, observe dans son activité une globalisation et davantage de communication autour du leadership des femmes. Pour autant, elle déplore une absence de candidates à un certain niveau de poste hiérarchique.

 

Faire bouger les lignes

 

Toute la clé du leadership de demain réside dans le fait de préserver une authenticité qui permet d’apporter de la valeur. En effet, il y a encore quelques années, les femmes dirigeantes reproduisaient sans doute malgré elles de nombreux codes masculins dans un management pas toujours représentatif de leur personnalité.

 

Un des freins persistants chez les femmes aujourd’hui semble être le fait d’oser, de s’autoriser et de se convaincre d’être à la hauteur. « Être à la hauteur » : cette notion si subjective et codifiée ne serait-elle pas le point de départ de l’autosabotage ? Le syndrome de « la bonne élève » dont souffrent principalement les femmes n’épargne pas même les plus insoupçonnées comme Angela Merkel ou Christine Lagarde. Amélie appuie ce propos en avouant que c’est parce qu’on lui l’a proposé qu’elle a saisi ce poste de Directrice Générale, auquel elle n’aurait jamais postulé en d’autres circonstances.

 

La rémunération est un autre axe dans lequel la marge de progression reste majeure. Claire s’interroge sur la responsabilité des femmes pour que le sujet évolue, tout en portant son attention sur le fait de ne pas tomber dans un clivage excluant les hommes de cette égalité. Et si les femmes osaient simplement négocier leur salaire afin de demander une rémunération à la hauteur de leur expertise et de leurs prétentions ? Fanny nous rappelle que « négocier son salaire c’est avant tout connaître et assumer sa valeur. »

 

Réel sexisme ou manque de connaissance ?

 

Il est probablement intéressant de tenir compte qu’en dépit des esprits fermés et conservateurs, un manque de connaissance reste évident chez un grand nombre de personnes et même chez les femmes, qui ont intériorisé des codes et modèles depuis toujours. Ce manque de connaissance semble parfois se confondre avec une mauvaise foi ambiante chez certains hommes, qui n’ont pas cheminé vers une déconstruction des schémas robustes de notre société.

 

Dans le débat de fin de table ronde, un intervenant évoque par exemple l’idée de mettre en valeur plus systématiquement auprès des hommes les « soft-skills » qu’apporte la paternité. Ceci est un atout considérable pour valoriser son profil en entreprise. Plus les hommes vont prendre, assumer et apprécier le congé paternité, plus ce sera un modèle pour d’autres. Les femmes pourront également arrêter de culpabiliser de bénéficier du leur.

 

Aussi, Amélie rappelle que nous devons travailler sur les perceptions et les représentations. Les comportements et tempéraments ne sont pas interprétés de la même façon chez les hommes et chez les femmes. Les femmes sont également plus sujettes à être épiées, analysées dans leur tenue vestimentaire ou leur attitude par exemple.

Peut-être que la problématique n’est pas exactement là où l’on pense qu’elle se trouve. Nous pouvons nous questionner sur les stéréotypes de genre qui sont encore bien établis. Cette division entre rose et bleu, qui persiste aujourd’hui, est peut-être insidieusement responsable de nombreuses inégalités.

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